L’Assemblée nationale a voté ce lundi 3 novembre 2025, dans le cadre du projet de loi de finances 2026, un amendement présenté par Jean-Philippe Tanguy (Rassemblement national) visant à rétablir l’exit tax dans sa version initiale de 2011.
Une mesure à forte portée symbolique, qui relance le débat sur l’équilibre entre justice fiscale et attractivité économique.
Qu’est-ce que l’exit tax ?
Créée en 2011 sous la présidence de Nicolas Sarkozy, l’exit tax avait pour objectif d’empêcher les contribuables fortunés de transférer leur résidence fiscale hors de France pour échapper à l’impôt sur la plus-value latente de leurs titres ou participations.
En clair : lorsqu’un contribuable quittait la France, la valeur de ses actions ou parts sociales était considérée comme si elles avaient été vendues, et la plus-value correspondante devenait imposable.
Allégée en 2019 par le gouvernement d’Édouard Philippe, la mesure avait perdu de sa portée : le délai de détention pour être exonéré passait de 15 ans à 2 ou 5 ans selon le montant du patrimoine. L’objectif affiché à l’époque était de renforcer l’attractivité du territoire français face à la concurrence fiscale européenne.
Le vote du 3 novembre 2025
L’amendement présenté par Jean-Philippe Tanguy (RN) a été adopté par 70 voix contre 55, avec 9 abstentions (LCP, 03/11/2025).
Le texte prévoit un retour à la version « originelle » du dispositif :
• un délai de 15 ans avant déchéance du report d’imposition ;
• une imposition immédiate des plus-values latentes lors du transfert du domicile fiscal ;
• et la possibilité de remboursement si le contribuable prouve qu’il n’a pas cédé ses titres pendant cette période.
L’adoption de cet amendement a créé la surprise : il s’agit d’une initiative d’opposition, portée par un député du Rassemblement national, qui a su rallier certains élus d’autres groupes soucieux de renforcer la lutte contre l’évasion fiscale.
Les motivations du Rassemblement national
Pour Jean-Philippe Tanguy, ce retour de l’exit tax vise à rétablir une équité fiscale :
« Il est anormal que certains puissent s’exonérer de l’impôt en transférant leur résidence fiscale quelques semaines avant la cession de leurs parts. » (déclaration rapportée par LCP, 03/11/2025)
L’élu estime que la suppression partielle de 2019 a créé une brèche, profitant à ceux qui disposent de moyens financiers suffisants pour déplacer leur patrimoine à l’étranger.
Selon lui, la mesure ne vise pas les entrepreneurs ou cadres expatriés, mais les « ultra-riches » cherchant à contourner l’impôt sur les plus-values.
Entre attractivité et contrôle fiscal
Du côté du gouvernement, les réserves sont nombreuses.
Le ministre de l’Économie, Roland Lescure, a rappelé que le dispositif initial avait été critiqué pour sa complexité administrative et ses effets négatifs sur l’investissement.
« Nous devons trouver un équilibre entre la nécessaire lutte contre l’évasion fiscale et la préservation de l’attractivité de notre économie. » (TF1 Info, 03/11/2025)
Les milieux économiques redoutent qu’un retour trop strict de l’exit tax décourage les implantations de dirigeants étrangers ou accélère la délocalisation de fortunes entrepreneuriales.
À l’inverse, plusieurs députés de la majorité reconnaissent que l’amendement soulève une question légitime de justice fiscale.
Un impact budgétaire incertain
Aucune estimation précise n’a encore été communiquée quant au rendement budgétaire attendu.
Dans sa version d’origine, la mesure rapportait quelques centaines de millions d’euros par an, mais son application restait aléatoire, dépendant des départs réellement contrôlés et des retours de capitaux.
Aujourd’hui, l’enjeu est avant tout symbolique : donner un signal politique de fermeté face à l’évasion fiscale, dans un contexte où le gouvernement cherche de nouvelles marges de recettes pour contenir le déficit public.
Une portée encore incertaine
Le vote du 3 novembre ne garantit pas l’entrée en vigueur définitive du dispositif. L’amendement doit encore passer l’étape du Sénat, puis être confirmé lors de la lecture finale du budget. Comme le rappelle LCP, « il faudra attendre la copie finale du projet de loi de finances pour savoir si cette disposition sera maintenue ».
En d’autres termes, la bataille politique ne fait que commencer.
Analyse : un signal politique plus qu’un tournant fiscal
Ce retour de l’exit tax intervient dans un climat budgétaire tendu.
S’il est peu probable que cette mesure bouleverse les recettes de l’État, elle confirme une tendance : la mobilité fiscale est redevenue un enjeu central du débat français.
Entre ceux qui prônent une France plus compétitive et ceux qui défendent une fiscalité plus équitable, le clivage s’installe durablement.
La question n’est plus seulement : combien paye-t-on ? mais où et pourquoi.
En conclusion : anticiper, structurer, protéger
Le retour de l’exit tax – même partiel ou symbolique – marque un tournant pour tous ceux qui envisagent une mobilité internationale, une expatriation fiscale ou la cession future de leur entreprise.
Chez WizeCounsel, nous analysons ces évolutions en temps réel afin d’aider les dirigeants, investisseurs et entrepreneurs à anticiper les réformes fiscales et à structurer leurs patrimoines dans le respect du droit international.
L’objectif n’est pas de fuir, mais de prévoir. Car une stratégie bien pensée aujourd’hui vaut mieux qu’une réaction précipitée demain.